Aujourd'hui c'est la Saint-Léon. J'ai revu en pensée mon grand-père maternel qui se prénommait Léon.
Il vivait dans un petit village à Guizengeard en Charente et n'a pas eu une vie facile. Cantonnier, il travaillait par tous les temps sur les routes, avec des pioches et des pelles. La maison qu'ils louaient n'avait ni électricité ni eau courante et les toilettes étaient dans une cabane au fond du jardin.
Sa femme et lui ont eu huit enfants : six filles et deux garçons, dont deux sont morts très jeunes. Ma mère était l'avant-dernière. Le garçon né après elle est mort à 6 mois d'une méningite, emporté en quelques jours. Puis c'est une des filles, agée de 17 ans qui a attrapé une rougeole et se levant trop tôt est décédée. Ma mère racontait que son père allait chercher de la glace dans la ville la plus proche, en vélo, pour faire tomber
la fièvre... C'était il y a à peine 60 ans...
Quand j'étais enfant, nous habitions à 150 kms de là et n'allions pas souvent voir les grands-parents maternels. Leur maison était glaciale et sans confort, et eux n'étaient pas chaleureux, ne nous prenaient jamais sur leurs genoux, n'avaient jamais une friandise à offrir à leurs petits-enfants. Ma mère était pourtant heureuse de les retrouver, eux et ses soeurs et frères.
A la retraite, mon grand-père a choisi d'aller vivre un peu plus loin, dans la ville où vivait son fils ainé. Ils ont acheté une petite maison et il est tombé malade presqu'aussitôt. C'était un homme grand et solide, mais le travail l'avait usé.
Ma grand-mère était une femme brune, petite et menue, toujours vêtue de noir, portant pour l'éternité le deuil de ses enfants. Après avoir élevé ses enfants, soigné ses bêtes (un mouton et quelques lapins), tenu sa maison, puis soigné son mari, elle est tombée malade à son tour et est décédée.
Mon grand-père, guéri, a donc vécu seul dans sa maison...
Je me souviens d'un été où il était venu passer les vacances à Arès avec nous, alors agés de 9 à 13 ans. Il voulait toujours jouer à la belote. Croyant y échapper nous lui avons appris le rami, mais ce jeu lui a plu et nous avons dû jouer tous les après-midi au rami... C'était plus une obligation sérieuse qu'un amusement pour nous.
En repensant à lui, je me rends compte que nous n'avons jamais vraiment parlé ensemble. Je ne sais rien de lui, excepté ce que ma mère nous a raconté.
J'étais timide et je ne suis pas allée vers lui, ne l'ai pas questionné, n'ai pas appris à le connaître et c'est bien dommage...